Appréciation in concreto de la résidence habituelle des époux par la Cour de justice de l’Union européenne
La Cour de justice de l’Union européenne précise les critères d’appréciation permettant de caractériser la résidence habituelle des époux dans le cadre d’un divorce international au sens du règlement Rome III.

Deux époux de nationalité allemande ont contracté mariage en Allemagne en 1989. Leur logement familial est fixé à Berlin. L’époux, diplomate, a été muté à Stockholm puis à Moscou où l’épouse l’a suivi tout en conservant le logement berlinois où y réside un des enfants majeurs. En mai 2021, les époux décident de divorcer. L’épouse rentre définitivement en Allemagne alors que l’époux se maintient en Russie dans le logement rattaché à l’ambassade d’Allemagne à Moscow.
L’époux dépose une requête en divorce auprès des tribunaux allemands en invoquant une séparation depuis le mois de janvier 2020. L’épouse conteste cette date. Elle estime que cette séparation date de mai 2021 à son retour à Berlin.
Le tribunal allemand rejette la demande de l’époux. La période d’un an de séparation exigée par le droit allemand n’étant pas expirée. Il forme alors un recours et le divorce est prononcé en vertu de la loi russe en application du règlement Rome III. L’épouse forme un pourvoi afin que le divorce soit
prononcé selon le droit allemand. La Cour fédérale saisit la CJUE d’une question préjudicielle sur la loi applicable au divorce au sens du règlement Rome III qui implique de déterminer la résidence habituelle des époux.
La Cour précise ainsi que pour l’interprétation de la résidence habituelle des époux au sens de l’article 8 sous a) et b) du règlement Rome III, ce dernier prévoit qu’à défaut de choix de la loi applicable par les époux, ils sont soumis à la loi de l’État de leur résidence habituelle au moment de la saisine de la juridiction ou, à défaut, de leur dernière résidence habituelle, pour autant que cette résidence n'ait pas pris fin plus d'un an avant cette saisine et que l'un des époux réside encore dans cet État au moment de ladite saisine.
Après avoir rappelé le principe de l’unicité de la résidence habituelle selon lequel l’époux qui partage sa vie entre deux États ne peut avoir sa résidence habituelle que dans un État, la Cour relève d’après une interprétation des circonstances de fait que les époux, malgré la durée de leur séjour en Russie, n'ont pas eu la volonté d'y fixer le centre habituel de leurs intérêts. Ce dernier étant demeuré dans l'État accréditant duquel ils ne se sont éloignés que de manière temporaire, de sorte que le droit allemand apparaît comme étant celui de l'État de la résidence habituelle des époux.
CJUE 20 mars 2025, aff. C-61/24
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